le secret de la foi !
Homélie 3é dimanche de Pâques : le secret
de la foi !
Rassemblement de l'Année de la Foi du doyenné d'Alet à Keriadenn - 14 avril 2013
Frères et Sœurs,
Puisque nous sommes entre nous ce matin, en
petit comité, j’ai décidé de vous révéler un grand secret, un secret utile en
plus : le secret de la Foi. Car bien souvent, on se demande comment la Foi
arrive. Pourquoi untel en est un modèle impressionnant et tel autre un mécréant
total ? Pourquoi votre fils que vous avez élevé de votre mieux dans la Foi
ne fait pas baptiser ces enfants aujourd’hui ? Pourquoi ce jeune lycéen
vivant dans une famille sans religion demande le baptême et fait un
extraordinaire chemin de foi ? Comment la Foi nait-elle, se développe
t-elle, se renforce t-elle dans le cœur d’un enfant, d’un jeune ou d’un
adulte ? La réponse peut valoir le coup non ? Surtout en ce rassemblement
que nous avons voulu au cœur de l’Année de la Foi.
Pour trouver une réponse à ces questions,
prenons justement un exemple. Un homme qui avait totalement perdu la foi et va
la retrouver de manière remarquable. Vous permettrez que je parle d’un bon ami
à moi : Charles de Foucauld. Si vous le connaissez un peu, vous ne pourrez
pas nier qu’il est devenu un de nos grands génies français de la Foi, notre
compatriote F.R. de Chateaubriand aurait dit « génie du
christianisme ». L’Eglise nous le propose d’ailleurs comme bienheureux. Et
pourtant l’histoire avait plutôt mal commencée. Après son baptême et son
enfance, il a tout oublié et engagé dans l’armée, mène une vie passablement
dissolue. Il en démissionne et décide alors d’aller explorer le Maroc. A
l’époque, il était interdit aux étrangers de s’y rendre. Il va donc se déguiser
en juif pour réussir son exploration. C’est alors qu’un premier choc se fera au
contact de ce peuple musulman très religieux. Lui le catholique déguisé en juif
va être troublé par la foi musulmane. « L'Islam
a produit en moi un profond bouleversement. La vue de cette foi, de ces âmes
vivant dans la continuelle présence de Dieu, m'a fait entrevoir quelque chose
de plus grand et de plus vrai que les occupations mondaines » écrit-il. De
retour à Paris, il en parle à sa confidente et cousine Marie de Bondy qui
l’envoie rencontrer un des grands spirituels de l’époque, l’abbé Huvelin. Alors
que Charles arrive plein de questions, ce dernier lui demande de se mettre à
genoux, de se confesser et de communier avant de répondre à toutes ses
questions. L’abbé Huvelin a vu juste. Plutôt que d’entamer une discussion, il
le fait rencontrer d’abord le Christ dans le sacrement du pardon et dans son
Eucharistie. A cette âme perdue, il propose le contact direct avec le Christ
présent. Et le Petit Frère Universel ne pourra plus revenir en arrière :
« Aussitôt
que je crus qu'il y avait un Dieu, je compris que je ne pouvais faire autrement
que de ne vivre que pour Lui. » dira t-il alors.
Et voilà notre secret ici dévoilé. Frère
Charles ne pourra plus se passer de Jésus, s’abandonnant chaque jour un peu
plus au Père du Ciel. Qu’est-ce qui l’a fait revenir à la Foi ? Pas des
livres, pas un raisonnement scientifique, pas des vagues sentiments romantiques
ou une spiritualité fumeuse. Non ! Une rencontre : la Rencontre. Avec
des hommes de foi d’abord. Mais surtout avec le Christ. « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ? ».
Exactement la même rencontre que celle de Pierre dans l’Évangile de ce matin.
Pierre, qui au moment critique du procès de Jésus, n’avait pas hésité par trois
fois à le renier. Pour aller au delà de cette triple trahison, Jésus lui a posé
par 3 fois la question : « Pierre, m’aimes-tu ? » Vas-tu
être fidèle à mon premier appel ? Ta foi qui a un temps vacillée va t-elle
retrouver le chemin de la confiance ? Oui, chers amis, pour Pierre, pour
Charles ou pour nous aujourd’hui, pas d’autres moyens de trouver et de faire
grandir la foi que de rencontrer le Christ et de l’entendre alors nous
demander : « M’aimes-tu ? ». Notez bien que la
question n’est pas : « t’intéresses-tu à moi ? » Mais bien
« M’aimes tu ? M’aimes
tu plus que ceux-ci ? ». Osons entendre le Christ nous poser la
question « Et toi, m’aimes-tu ? ».
Osons y répondre sérieusement. Avec la gravité et la peine de Saint Pierre. « Seigneur, tu sais tout. Tu sais bien
que je t’aime ». Cette réponse donnée permet à celui qui la prononce de
faire de grandes choses. C’est la pêche miraculeuse. A qui fait confiance au
Christ et jette encore le filet après une nuit sans rien prendre, Dieu le
remplit à plein, Dieu donne en abondance. Il change la vie et remplit de ses
dons, de ses grâces.
Aux
apôtres, emprisonnés, jugés, fouettés, l’auteur des Actes des Apôtres nous
rapporte qu’ils « repartaient tout
joyeux d’avoir été jugés dignes de subir des humiliations pour le nom de Jésus. ».
N’est-ce pas un don de la foi cela ? Les Apôtres avaient rencontré le
Christ ressuscité, plus rien ne leur faisait peur. Leur force était en Lui, qui
avait vaincu la mort, la ténèbre la plus profonde.
Nous vivons dans un monde où dire sa foi au
Christ n’est pas facile. Je pense à ces fiancés rencontrés récemment qui m’ont
dit retourner à la messe depuis leur préparation mais qui pensent ne pas
pouvoir la célébrer lors de leur mariage en fonction de leurs invités peu
croyants. Oui, c’est dur d’être témoins de la Rencontre. Et pourtant qui
d’autres que nous le fera ? « Quant
à nous, nous sommes les témoins de tout cela, avec l’Esprit Saint, que Dieu a
donné à ceux qui lui obéissent. » Comme les Apôtres d’hier, Dieu
nous a choisi pour porter au monde sa Bonne Nouvelle. « Que mon cœur ne se taise pas »
chantait le psalmiste. Oui, le cœur qui a rencontré le Christ ne peut se taire.
Ou alors il ne l’a pas rencontré vraiment ! « Quand Simon-Pierre l’entendit déclarer que
c’était le Seigneur, il passa un vêtement, et il se jeta à l’eau. »
Frères et Sœurs,
Maintenant, il faut nous jeter à l’eau, nous
aussi. Ce matin, nous avons fait un bel effort pour nous retrouver tous ici et
célébrer ensemble dans la joie le Christ ressuscité. Nous avons osé quitter nos
églises, aussi belles et attachantes soit-elles, pour nous rassembler. Car il
est passé le temps où la peur tenait les apôtres enfermés au Cénacle. Il est
passé le temps où chacun se recroquevillait jalousement sur son clocher. Il
nous faut sortir, aller au grand large, « aux périphéries » dit le
Pape François. « On a parlé
d’évangélisation. C’est la raison d’être de l’Église, « la douce et réconfortante
joie d’évangéliser » de Paul VI. C’est Jésus-Christ lui-même qui, de
l’intérieur de nous-mêmes, nous pousse. L’Église est appelée à sortir
d’elle-même et à aller vers les périphéries. » En sortant de cette
célébration, j’espère que nous dirons comme les disciples d’Emmaüs au soir de
Pâques, « notre cœur n’était-il pas
brûlant alors qu’il nous parlait et nous partageait le pain ? ». Dans
cette assemblée, dans la Parole et le Pain partagé, nous rencontrons le Christ
vivant. Il faut dire au monde cette nouvelle. Le Pape François a été
clair : « Nous pouvons marcher
comme nous voulons, nous pouvons édifier de nombreuses choses, mais si nous ne
confessons pas Jésus Christ, cela ne va pas. Nous deviendrons une ONG
humanitaire, mais non l’Église, Épouse du Seigneur. Quand on ne marche pas, on
s’arrête. Quand on n’édifie pas sur les pierres qu’est ce qui arrive ? Il
arrive ce qui arrive aux enfants sur la plage quand ils font des châteaux de
sable, tout s’écroule, c’est sans consistance. » Maintenant que nous
en avons le secret, ayons donc une foi consistante, fondée sur l’amour
indéfectible de Dieu pour chacun d’entre nous. Et soyons sans cesse témoins de
cet amour, serviteurs de la charité, de la fraternité pour bâtir une Eglise
nouvelle, pour participer à bâtir un monde nouveau, la « civilisation de l’amour ».
Amen !