Le ciel sur la terre !
Frères et Sœurs,
Lorsque j’étais petit enfant, nous regardions
« Bonne nuit les petits » avec Nounours, notre aimable visiteur du
soir. Et cela se terminait à chaque fois par cette scène terrible que nous
redoutions tous où Nounours repartait sur son petit nuage. Nous aurions
tellement aimé que cela dure encore !
Pardonnez-moi ce parallèle un peu trivial et
enfantin, à chacun ses références, mais le sentiment des Apôtres à l’Ascension
a du un peu être le même dans un premier temps. Déjà marqués par la rupture
dramatique de la Passion, comme ils auraient aimé que Jésus resta encore près
d’eux, remplissant les filets vides ou préparant pour eux un repas au bord du
lac. Mais « il fallait que
s’accomplisse ce qui était annoncé dans l’écriture ». Saint Luc
décrit : « il se sépara
d’eux et fut emporté au ciel. » Ce qui aurait pu être une nouvelle et
dernière séparation se vit tout à fait autrement. « ils retournèrent à Jérusalem remplie de joie. Ils étaient sans cesse
dans le temple à bénir Dieu ». Réaction fort étonnante et complétement
opposée à celle de la mort de Jésus. Rappelez vous le désarroi des disciples
d’Emmaüs par exemple. Comment expliquer cela ? Et comment nous mêmes ne
pas être comme des victimes collatérales vingt siècles plus tard de ce départ
au ciel ? « Et comme ils fixaient encore le ciel où Jésus s’en
allait, voici que deux hommes (…) disaient : « Galiléens, pourquoi
restez-vous à regarder vers le ciel ? ». Ces deux mêmes hommes , sans doute, qui
avaient avertis les femmes au matin de la Résurrection : « vous
cherchez Jésus le Crucifié ? Il n’est pas ici. Il est
Ressuscité ! ».
La première attitude spirituelle à laquelle
nous invite cette fête de l’Ascension, qui vous l’avez bien compris est
intiment liée à celle de la Résurrection et de la Pentecôte qui va suivre, est
de ne pas chercher le Christ là où il n’est pas ! C’est à dire dans un
ciel imaginaire, un petit nuage au dessus de nous, qui l’éloigne et le protège
de toutes nos difficultés terrestres. Si le Fils de Dieu est venu sur terre,
s’il s’est manifesté aux hommes, s’il s’est incarné en un temps et en un lieu,
c’est bien pour rester présent parmi nous, aujourd’hui et jusqu’à la fin du
monde. Jusqu’à son retour annoncé et attendu. De tout temps, l’Eglise a été attentive
à nous dissuader des tentations de spiritualisme. C’est à dire de vouloir par
trop distinguer le monde de Dieu et le nôtre, le Ciel, où tout serait bien et
bon (après Nounours, nous serions au pays des Bisounours !) et la terre,
cette vallée de larmes. Or le génie du Christianisme est justement d’avoir en
Jésus Christ relié intimement les deux. Ainsi au début de la veillée pascale,
dans l’annonce de l’Exultet, nous avons chanté, non sans émotion, ce verset
sublime : « Ô nuit
bienheureuse, où se rejoignent le ciel et la terre, où s’unissent l’homme et
Dieu. » . Pour trouver Dieu, il ne s ‘agit donc pas seulement de
lever les yeux au ciel. Mais de les ouvrir sur les réalités de notre monde où
Dieu est présent. Ainsi comme ne pas évoquer aujourd’hui l’ouverture à Lourdes en
ce moment même du rassemblement national Diaconia 2013 ? De notre diocèse,
près de 200 personnes ont pris la route pour s’y rendre. Ce qui est étonnant
est que cette délégation n’est pas seulement constituée de personnes engagées
dans le Secours Catholique, la Société Saint Vincent de Paul ou tous les
différents organismes de charité mais il y a aussi une centaine de personnes
aidées qui sont parties. Ecoutons leur souhait pour cette rencontre :
« Mon rêve c’est d’aller à Lourdes, je
veux partager ce bonheur et le ramener dans ma paroisse. Je ne voudrais plus de
discrimination. »
« Partager des journées et nuits avec des
personnes en fragilités, être un bâton de route, mais aussi trouver des appuis
pour aller plus loin dans ma Foi. Trouver à Lourdes dans ce rassemblement des
nouveaux modes de vie en Eglise. Trouver des lieux de fraternité, de
tolérance. »
« Notre force est dans la communion entre
nous. On sera plus fort après dans nos paroisses pour être témoin de l’amour de
Dieu dans nos vies. Nous devons croire en l’homme et ses
possibilités. »
« Aller à Lourdes ? C’est remercier
la Vierge de toutes les grâces que j’ai eues. Quand on fait le bilan :
octobre : SDF ; Février : un appartement ; Avril : un
travail ! »
Il y a des lieux sur terre où le ciel se
manifeste avec plus d’évidence. Assurément Lourdes en est un. Il est donc
formidable que viennent aujourd’hui se rassembler ces hommes et ses femmes dans
la ville de l’humble Bernadette, qui a connu la précarité, l’humiliation avec l’arrestation
de son père mais aussi la grâce de la visite de la Dame qui l’a relevé en la
« regardant comme une personne » témoigne la sainte.
Cette rencontre nationale en ce jour de
l’Ascension vient bien nous dire que notre devoir de chrétien est aujourd’hui
et maintenant de nous appliquer à faire advenir le ciel sur la terre.
« Vous serez mes témoins, dit Jésus dans son ultime message, jusqu’aux
extrémités de la terre ». Lorsque Jésus est monté au ciel, il n’a pas
laissé les Apôtres les bras croisés et les yeux au ciel. Il les a bénis et leur
a donné une mission avec « la force de l’Esprit Saint, la force venue d’en
haut ». Saint Luc précise que les apôtres retournèrent à Jérusalem, tout
joyeux donc, avec « la certitude que donne la foi » et qu’ils
« étaient sans cesse dans le Temple à bénir Dieu ». Ce temple, c’est
l’Eglise. Ce Temple, c’est le Corps du Christ. Ce Temple est donc à bâtir des
pierres vivantes que nous sommes. Il est à bâtir chaque jour autour de la
Pierre Angulaire qu’est le Christ. Nous en sommes donc à la fois les héritiers
et les bâtisseurs. Le départ de Jésus vers le Ciel est donc clairement un appel
pour chacun d’entre nous à vivre pleinement sa mission de baptisé dans le
monde, son appel à la sainteté comme a aimé à le rappeler le Concile Vatican
II. D’une manière inédite, nous pouvons être impressionnés par l’exemple qui
nous vient du Saint Père, par cette volonté qu’il manifeste de cohérence entre
les paroles et les actes. Je ne pense pas trahir de secret en racontant ce que
m’a rapporté dernièrement une paroissienne. Beaucoup d’entre vous connaissent
le P. Bède qui est venu rendre service dans notre paroisse plusieurs étés de
suite. Vous savez qu’il est maintenant en poste à Rome pour sa congrégation des
Spiritains. Un midi, il déjeunait avec le Supérieur de sa congrégation au
Vatican. Et le supérieur lui a dit pendant le repas : « à la table,
derrière toi, il y a le pape. » Et c’est ainsi dans la simplicité d’une
salle de restaurant que le P. Bède a rencontré le Pape François.
Chers amis,
C’est l’Eglise toute entière, qui à l’image de
son Pasteur, est invitée à poser des signes concrets et évidents de la présence
du Christ parmi nous. Nous pouvons le faire dans de grands rassemblements.
Saint Malo va accueillir dans qq semaines Cap et Tim, près de 3000 collégiens
de notre diocèse. Puis cet été les JMJ
Breizhiliennes ou le Festival d’évangélisation Anuncio. Nous pouvons aussi le faire plus modestement dans l’accueil
fraternel des uns et des autres, dans les responsabilités professionnelles,
associatives, politiques ou bien sur ecclésiales qui sont les nôtres. A ce
sujet, je pense que nous avons encore à nous laisser convertir par la présence
des enfants dans nos assemblées. Ils sont peut être un peu bruyants, un peu
dissipés… mais n’oubliez pas que le Royaume de Dieu leur ressemble et que
« celui qui accueille en mon nom cet
enfant, c'est moi qu'il accueille », rappelle Jésus.
Dans quelques instants, après s’être manifesté
dans sa Parole, Dieu va se rendre présent dans l’Eucharistie. Mais aussi dans
notre assemblée réunie. C’est pourquoi le thuriféraire vous encensera.
Puissions-nous ensemble, bénir le Seigneur en étant des signes vivants du
Royaume et de sa présence au cœur du monde.
Spéciale dédicace à JM !
Spéciale dédicace à JM !