La force de servir !
Homélie 27é dimanche du T.O.
Luc 17, 5-10
Frères et Sœurs,
Le passage d’évangile de ce jour a quelque chose de
déroutant. Il est clairement composé de deux paragraphes avec deux idées assez
différentes l’une de l’autre. D’abord il y a la réponse de Jésus à la demande
des apôtres « augmente en nous la foi ! ». Réponse étonnante car
il a l’air de les malmener. Puis il y a cette parabole du serviteur et du
maître où il nous invite à être des serviteurs quelconques qui n’ont fait que
leur devoir ». Ce que nous fit Jésus ici ne peut être compris qu’avec les
« lunettes de la foi » ; à la lumière de la foi. Je m’explique.
D’abord aux apôtres, Jésus répond avec vigueur en leur disant
que la question n’est pas juste. Il ne s’agit pas d’augmenter la foi. D’en
remettre une couche. D’en avoir plus ! Là n’est pas la question. Et Jésus
prend cette image de la graine de moutarde, qui est pour l’auteur biblique, la
plus petite graine de la terre. Ce qui est donc nécessaire, ce n’est pas
d’avoir plus de foi comme on essaie d’avoir plus d’argent, de biens, de livres
dans sa bibliothèque on de vin dans sa cave… Non, la foi ne se pèse pas au
kilo ! Elle est un don de Dieu qui, par contre, comme l’écrit Saint Paul,
a parfois besoin d’être réveillé. Dieu donne à chacun cette graine de foi. Et
nous sommes la terre dans laquelle elle va soit mourir, soit resté en attente,
soit s’épanouir. Jésus dit donc aux apôtres : mettez vos lunettes, les
gars ! Soyez attentifs et découvrez en vous ce don de la foi. « Car ce n'est pas un esprit de peur que Dieu
nous a donné, mais un esprit de force, d'amour et de raison. » La foi
est une force qui peut nous permettre de déplacer des montagnes ou de dire à un
arbre « 'Déracine-toi et va te
planter dans la mer', et il vous obéirait. » Avons-nous, frères et sœurs,
une foi assez grande pour oser une telle demande ? Force est de constater
que non. Mais certains osent. Je pense par exemple à ces parents qui osent se
lancer dans la catéchèse de leurs enfants. Ils ne sont pas des experts. Mais
ils osent et font confiance à la force de la grâce de Dieu. « N’aie pas
honte de rendre témoignage » dit Saint Paul. Et le Pape François a précisé
la semaine dernière aux catéchistes : « Mais
attention ! Jésus ne dit pas : allez, débrouillez-vous. Non, il ne
dit pas cela ! Jésus dit : Allez, je suis avec vous ! C’est cela
notre beauté et notre force : si nous allons, si nous sortons porter son
Évangile avec amour, avec un vrai esprit apostolique, avec vérité (parresia), Lui marche avec nous, nous
précède, Le Seigneur nous précède toujours. » Ainsi, dans le bonheur ou
dans les épreuves, comme on dit aux mariages, nous avons cette force, la force
de cette présence qui assure nos pas. Nous avons la foi, grande au moins comme
une graine de moutarde ; à nous de la tenir en éveil… Comment ? En la
vivant !
Et
c’est là, me semble t-il, le lien avec la deuxième partie de l’Evangile. En
étant d’humbles serviteurs. Benoit XVI avait dit cela au jour de son
élection : « je suis un humble ouvrier dans la vigne du Seigneur ».
Le Pape porte ce beau titre d’être le « serviteurs des serviteurs ».
Benoit XVI et bien sûr François nous montrent l’exemple. A l’image de François
d’Assise, célébré ce vendredi, le poverello, le Pauvre d’Assise. Tout pauvre
qu’il était vraiment, il s’était senti appelé à une mission qu’on pourrait dire
pas très humble : « rebâtir l’Eglise » à une époque où elle en
avait bien besoin. Faire à nouveau souffler l’air vivifiant de l’Evangile dans
toute sa pureté. Et il y a réussi à tel point qu’on en parle encore près de
1000 ans plus tard. Il l’a fait en restant le Très bas, selon le titre d’un
très beau livre. Etre au service, le grec du nouveau testament se traduit même
par esclave, n’est pas très valorisant. Mais être au service du Seigneur
devient une tache très noble car lui-même nous a servi le premier. Lui-même
s’est mis à genoux devant ses apôtres pour leur laver les pieds.
Frères
et Sœurs,
L’évangile
de ce jour est une belle illustration du chemin que nous sommes invités à
prendre dans notre diocèse. Nous sommes encore dans l’année de la Foi et nous
allons entrer dans l’année de la Charité. C’est la Foi qui nous permet d’oser
vivre la Charité, d’oser sortir vers ce que le Pape François appelle les
« périphéries ». Je ne peux m’empêcher de citer encore cette parole
forte toujours aux catéchistes : « Quand nous, chrétiens, nous sommes fermés sur notre groupe, sur notre
mouvement, sur notre paroisse, sur notre milieu, nous restons fermés et il
arrive ce qu’il arrive à tout ce qui est fermé ; quand une pièce est fermée,
elle commence à sentir l’humidité. Et si une personne est dans cette pièce,
elle tombe malade ! Quand un chrétien est fermé sur son groupe, sur sa
paroisse, sur son mouvement, il est fermé, il tombe malade. Si un chrétien sort
dans les rues, les périphéries, il peut lui arriver ce qui arrive à des
personnes qui vont dans les rues : un accident. Bien des fois nous avons vu des
accidents de la route. Mais je vous dis : je préfère mille fois une Église
accidentée, et non une Église malade ! » Et à Assise, il a ajouté, notamment à
l’adresse du clergé : "N'ayez
pas peur" de rencontrer les personnes marginalisées, méprisées (…) Ne vous
laissez pas bloquer par des préjugés, des habitudes, des rigidités mentales et
pastorales, et par ce réflexe : Cela a toujours été comme ça."
Que
retenir donc ?
1.
Ma foi peut être petite comme une graine de moutarde, elle me
donne la force de témoigner sans peur de l’Evangile.
2.
Et cela peut se vivre particulièrement dans le service humble de
mes frères et sœurs les hommes, dans l’exercice de la Charité, d’un amour vécu.
Beau
programme… On commence demain ? Ou tout à l’heure ?
Amen !